Jules Janin, Voyage en Italie, 1839
"Ainsi vous marchez de tristesses en tristesses. Vous ne comprenez pas comment la Sainte Cécile de Raphaël peut consentir à habiter plus longtemps cette misérable solitude; votre œil épouvanté s’arrête à peine sur les pans de murailles sur lesquelles restent encore quelques lambeaux de couleurs effacées par l’orage; vous vous retournez de temps à autre frappé du bruit de vos pas, comme si quelque docteur de l’antique Bologne allait vous suivre; vous marchez ainsi d’arcades en arcades, et peu à peu je ne sais quel instinct funèbre vous pousse à savoir ou donc s’arrêteront toutes ces arcades et à quelle ruine, à quel abîme, à quel néant elles peuvent conduire- Vous allez toujours ainsi tout droit devant vous, abrité contre le soleil ; et quand vous avez fait trois mille pas et parcouru sept cents arcades, vous arrivez. Eh! donc ou voulez vous arriver ainsi, sinon à un cimetière? En effet, ces arcades autour de Boulogne, ce sont le grands bras que tend le cimetière à la ville, comme l’ogre, pour la mieux embrasser. La ville et le cimetière c’est même chose; ils sont abrités par la même toit, on y va de plain pied et malgré soi, et par la force même de la route qui y conduit. entrer dans la ville, c’est entrer dans ces tombeaux ; la ville et les tombeaux, ils ont a peu près par le même peuple. dormir ici ou vivre là-bas, c’est même chose. Que si vous demandez aux habitants de la ville pourquoi ils n’habitent pas avec les autres morts, ils vous répondent justement : « Parce que c’est la même chose! »
Cependant il faut dire qu’à tout prendre, le cimetière de Bologne est plus gai que la ville. Il y a plus d’air, plus d’espace, plus de verdure, les arcades sont plus hautes, les maisons plus blanches et mieux rangées. Il n’y a pas trente ans que la première pierre de cet élégant cimetière a été posée par quelques morts du douzième et du treizième siècle qui ont bien voulu y transporter leur nom et leur épitaphe ; à leur exemple, quelques morts modernes ont consenti à se faire enterrer dans cette terre nouvellement consacrée. Cette ville, qu’on pourrait appeler la Bologne-Neuve, Villa Nova, est située dans le jardin de l’ancienne chartreuse ; elle a toutes les commodités et aussi toute la disgrâce d’une ville fait d’hier. Rien ne ressemble à ces tombes neuves comme ces maisons neuves dont on ne connaît encore ni le propriétaire, ni les habitants. Seulement, pour pénétrer sous ces arcades consacrées au repos éternel, il vous faut traverser la vieille église des chartreux et quelques petits fragments de l’ancien cloître, où se lisent encore les noms de Canali, de Cesi, de Louis Carrache et de la jeune Élisabeth Sirani, l’élève de Guide, aussi grand peintre que la jeune Properzia de Rossi était un grand statuaire; car Bologne a donné le jour à plus d’un talent féminin excellent. Bologne se souvient encore d’une autre jeune fille, Novella d’Andrea, si savante qu’elle enseignait le droit canon, et si belle qu’elle cachait sa tête derrière un voile de laine. Pauvres grandes artistes qui, malgré leur science et leur génie, restaient au fond du cœur de simples femmes, avec leurs passions, leurs terreurs, leurs croyances, leurs faiblesses et leur amour! J’était donc arrivé sans m’en douter au milieu du cimetière de Bologne; et à l’aspect de ces grandes pierres blanchâtres surmontées de très mauvaises statues, j’essayais de me rendre compte du monument singulier que j’avais sous les yeux, lorsque le gardien du champ funèbre vint à ma rencontre d’un air presque aussi satisfait que si j’eusse été un nouveau mort. Ce gardien, après le pape, du repos de Bologne, est à coup sûr un des créatures les plus extraordinaires que j’aie rencontrées en ma vie. Il a vue construire la première tombe de ce lieu il est le maître visible; il a vue creuser la première fosse, il a vue s’élever, un après l’autre, ces murailles, ces arcades, et il a pris sa ville dans un amour dont je ne saurais vous donner l’idée. Monsieur, me dit-il, apprenez que notre cimetière est encore mieux disposé que la ville de Turin, et qu’il a beaucoup plus de perspectives. Disant ces mots, il me faisait remarquer en effet comment ces longues rues remplies de morts aboutissent toutes à un jardin, à une montagne, à une pièce d’eau, à une prairie; à travers cette enfilade de tombes, la vue se perd au loin dans la campagne, et sans nul doute c’est là une effet pittoresque. Je ne pourrais vous donner une meilleure idée de ce cimetière, qu’en le comparant au Palais-Royal, à Paris."
[V’inoltrate di mestizia in mestizia. Non giungete a capire come la Santa Cecilia di Raffaello possa consentire ad abitare più a lungo quella misera solitudine; il vostro occhio spaventato si sofferma brevemente sugli ammassi di mura, ove si scorgono peranche tracce di colori sbiaditi dal turbine; vi voltate dietro di tratto in tratto, come se qualche dottore dell’antica Bologna vi seguisse; andate così d’arco in arco e poco a poco non so qual istinto funebre vi spinge a sapere dove mai si fermeranno tutti quegli archi, ed a quale rovina, a quale abisso, a quale nulla essi possono far capo. Andate sempre diritto diritto, al riparo del sole; e quando avete fatto tre miglia e percorso settecento archi, siete giunto. Eh! dove volete dunque giungere così, se non a un cimitero? Infatti, questi volti attorno a Bologna, sono le grandi braccia che il cimitero tende alla città, come l’orco per meglio abbracciarla. La città e il cimitero sono tutt’uno; sono coperti dallo stesso tetto, vi si va di pari passo e malgrado noi, sospinti dalla forza stessa della via che vi ci conduce. Entrare in città è come entrare, quasi direi, in quelle tombe; città e tombe hanno la medesima forma, sono circondate dallo stesso silenzio, sono abitate su per giù dallo stesso popolo. Dormire qui o vivere colà, è la stessa cosa. Che se voi chiedete agli abitanti della città perché non dimorano cogli altri morti, vi risponderanno con ragione: Perché è lo stesso!
Però bisogna dire che, tutto sommato, il cimitero di Bologna è più allegro della città. V’è più aria, più spazio, più verde, gli archi sono più alti, le case più bianche e meglio disposte. Non volsero ancora trent’anni dacché la prima pietra di questo elegante cimitero venne posta da qualche morto del dodicesimo e del XIII secolo i quali si compiacquero trasportarvi il loro nome, e la loro epigrafe; dietro il loro esempio, qualche morto moderno acconsentì di farsi seppellire in questa terra di recente consacrata. Tale città che potrebbe chiamarsi Bologna Nuova, Villanova, è posta nel giardino dell’antica Certosa, possiede tutte le comodità del pari che tutta la disgrazia di una città sorta da ieri. Nulla di simile a quelle tombe nuove come a quelle case nuove, di cui ancora non si conosce il proprietario, né gli abitanti. Se non che per penetrare sotto quegli archi sacri, al riposo eterno, fa d’uopo attraversare la vecchia chiesa dei Certosini ed alcuni piccoli frammenti dell’antico claustro, dove si leggono peranco i nomi di Canali, di Cesi, di Luigi Carracci e della giovane Elisabetta Sirani, l’allieva del Guido, grande pittrice, nella stessa guisa che la giovane Properzia De Rossi era una grande statuaria; giacchè Bologna ha dato la luce a più di un ingegno femminile eccellente. Bologna vi sovviene ancora di un’altra grande fanciulla, Novella d’Andrea, sapiente così da insegnare il diritto canonico, e così bella da dover nascondere il suo viso dietro un velo di lana. Poveri grandi artisti, che ad onta della loro scienza, e del loro ingegno, rimanevano in fondo al cuore semplici donne, colle loro passioni, il loro terrore, le loro credenze, le loro debolezze ed il loro amore!
Giunsi dunque, senza accorgermene al cimitero di Bologna; ed all’aspetto di quelle grandi pietre biancastre con sopra cattivissime statue, provai di farmi un raziocinio sul monumento singolare che mi stava innanzi, allorché il custode del campo funebre venne a me con cera così allegra come se fossi stato un morto. Dopo il papa, questo custode, del riposo di Bologna, è per fermo uno degli esseri più straordinari cui m’abbia incontrati in vita mia. Vide sorgere la prima tomba di questo sito del quale egli è il padrone visibile; vide scavare la prima fossa, vide innalzarsi, l’un dopo l’altro, quei muri, quei volti, epperò egli si è innamorato della sua città in modo da non credersi, Signore, disse egli, sappiate che il nostro cimitero è anche meglio posto e meglio disposto che non sia la città di Torino, e che ha maggiori prospettive. Ciò dicendo mi faceva osservare come in vero quelle lunghe vie piene di morti riescano tutte ad un giardino, ad una montagnola, ad un laghetto, ad una aiuola; in mezzo a quei filari di sepolcri, la vista si perde in lontananza nella campagna, ed è questo senza dubbio un effetto pittoresco. Non potrei darvi miglior idea di tale cimitero, che col paragonarlo al Palais-Royal a Parigi. traduzione tratta da A. Sorbelli, 1987]
Ultimo aggiornamento: martedì 21 giugno 2011